À l’extrême ouest de l’Irlande, au large du Connemara, les îles d’Aran sont l’un des sanctuaires de l’âme gaélique. Battues par les vents, couvertes de roches, elles témoignent de la capacité de l’homme à façonner le paysage pour vivre dans les conditions les plus hostiles.

Aborder les îles d’Aran se mérite et les conditions météos rendent bien souvent le trajet assez périlleux. Et en y accostant, on reste songeur quant à l’abnégation et à l’irréductible volonté qu’il a fallu à ses habitants pour y séjourner et pour tenter d’en faire un endroit accueillant. Les îles d’Aran sont en effet le prolongement géologique de la presqu’île de Buren, une zone karstique où la végétation est très réduite. Pendant des siècles, depuis la Préhistoire, les hommes ont donc construit des murets de pierre pour protéger des petites parcelles du vent et de l’érosion. Ils y ont apporté des algues et de la terre depuis la grande île, afin de constituer une fragile couche de terre végétale pour la culture et l’élevage.

Les pulls et la laine des îles d’Aran constituent toujours l’une des principales activités des insulaires. Les motifs tricotés varient suivant les familles et les clans d’Aran. Inusables et artisanaux, ces lainages sont très prisés des visiteurs. On peut déambuler à travers les îles et leurs paysages étonnants grâce à des minibus ou dans des calèches à cheval. L’occasion de découvrir un patrimoine naturel exceptionnel et préservé. Les îles d’Aran se distinguent ainsi par la richesse de leur faune sauvage, notamment les oiseaux marins qui nichent sur les falaises ou les phoques que l’on peut fréquemment apercevoir sur les plages.

Le fort de Dun Aengus

L’Irlande conserve plusieurs centaines de forts circulaires, construits en pierres sèches. Mais le plus fameux est celui de Dun Aengus, sur Inishmor, l’un des plus impressionnants monuments préhistoriques en Europe. Plusieurs enceintes semi-circulaires ont en effet été construites sur le flanc d’une falaise qui culmine à 60 mètres au-dessus d’un océan bouillonnant. Au bord du vide, au centre du site, une grande plateforme devait avoir une fonction religieuse. Le paysage est à couper le souffle, d’autant que les rafales de vent rendent quelque peu angoissants les abords de la falaise. La construction de cette forteresse a débuté il y a plus de trois millénaires et elle a été occupée jusque vers l’an Mille, lorsque des Vikings ont ravagé le lieu. Elle aurait été la résidence d’Aengus, l’un des hauts rois d’Irlande au début du Moyen Âge.

L’archipel des écrivains

Longtemps isolées, les îles d’Aran constituent l’un des conservatoires de l’âme gaélique et une source d’inspiration pour les artistes. Au début du XXe siècle, l’écrivain et dramaturge John Millington Synge est venu y parfaire sa connaissance de la langue irlandaise. L’archipel lui a inspiré sa pièce la plus célèbre, « Le Baladin du monde occidental » dont la présentation, en 1907, à l’Abbey theatre de Dublin, provoqua une émeute. Né sur Inishmore, le romancier Liam O’Flaherty y a tourné, dans les années 1930, un documentaire resté célèbre, « L’Homme d’Aran », maintes fois primé. Enfin, l’écrivain voyageur Nicolas Bouvier a également séjourné dans l’archipel, y rédigeant son « Journal d’Aran et autres lieux ».

Au départ de Rossaveal pour les îles d’Aran.

Les ruines de l’église médiévale de Saint Cavan.

Les carrioles à cheval offrent plusieurs circuits à travers les îles.

Patiemment, pendant des siècles, les insulaires ont élevé de petits murets pour protéger les champs et leur fine couverture végétale.

Comme le Burren voisin, les îles d’Aran constituent un plateau karstique, vestige d’une ancienne mer préhistorique.

La première ligne de défense du fort de Dun Aengus était constituée de blocs rocheux dressés en épines dans la lande.

La forteresse de Dun Aengus a été bâtie sur le flanc d’une falaise à 60 mètres au-dessus de la mer.

 

Erwan Chartier
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