C’est l’un des sites les plus prestigieux du Portugal et l’un des plus mystérieux. A la fois forteresse et couvent, Tomar a été le refuge des derniers Templiers, avant qu’ils ne se fondent dans l’ordre du Christ qui devaient impulser les grandes découvertes portugaises puis européennes.

Au centre du Portugal, le couvent forteresse de Tomar est l’un des nombreux monuments lusitaniens classés au patrimoine de l’Humanité par l’Unesco. Depuis des décennies, il ne cesse d’attirer les visiteurs en raison de son architecture atypique, mais surtout de son lien avec les Templiers et de leur trésor qui enflamme les imaginations. Même si certains ont déliré en imaginant l’arche d’Alliance et d’autres objets bibliques enterrés dans des souterrains, ils n’ont peut-être pas tort, si on estime que le fameux trésor n’était pas physique, mais intellectuel, puisque Tomar a été au cœur du début des grandes découvertes de la Renaissance.

Fondé après la prise de Jérusalem, lors de la première croisade, l’ordre des Templiers tient son nom de l’ancien temple de Salomon, épicentre du judaïsme, où est bâtie l’un des trois lieux saints de l’Islam, la mosquée d’Omar, célèbre pour son dôme doré. L’endroit est aujourd’hui encore l’un des lieux les plus sacrés du Monde, au croisement des trois grandes religions monothéistes. L’ordre du Temple se développe ensuite très vite et attire de nombreux nobles en quête d’un idéal chevaleresque et religieux.

Ces moines soldats recrutent dans toute la chrétienté et entendent défendre les terres chrétiennes du Levant. Ils opèrent aussi dans la péninsule ibérique, conquise au VIIIe siècle par les musulmans. Elle est lentement reconquise par les royaumes espagnols et portugais.

La Rotonde et le souvenir de Jérusalem

En 1160, les Templiers fondent la forteresse de Tomar. Ils introduisent des techniques architecturales venues d’Europe du Nord, comme les tours rondes. La citadelle protège alors le tout jeune royaume de Portugal. Trente ans plus tard, elle résiste vaillamment contre les assauts des armées du Calife. Au pied des murailles, une petite bourgade se développe. Les templiers font de la citadelle un couvent. Ils construisent notamment une étonnante église romane : la Rotonde.

A l’extérieur, l’édifice est en effet de forme polygonale, à seize côtés. L’intérieur est de forme ronde. Il s’agit de la reproduction de la mosquée d’Or de Jérusalem, considérée peut-être à l’époque, comme le vestige du temple de Salomon. Ce qui souligne l’importance que les templiers ont donné à la ville de Tomar.

Tout au long des croisades, les Templiers s’enrichissent considérablement. On dit qu’ils constituent un trésor incroyable. Ils prêtent surtout des fonds aux puissants, dont le roi de France, Philippe Le Bel qui va monter une cabale contre eux. Avec un pape français, il obtient la condamnation des dirigeants du Temple et l’ordre est dissous en 1312.

Où est le trésor ?

Le roi de France ne parviendra jamais à mettre la main sur le « trésor » des templiers. Mais ce dernier était-il matériel ou spirituel ? Dans un pays d’Europe, le Portugal, on n’a pas oublié le rôle de l’ordre dans la reconquête patiente du territoire. En 1319, le roi Denis Ier crée l’ordre du Christ qui récupère les capitaux et les hommes du Temple. De nombreux templiers persécutés arrivent de toute l’Europe dans le royaume lusitanien avec leurs connaissances, sans doute leur véritable trésor. Ils font de Tomar leur centre politique et intellectuel.

Un siècle plus tard, en 1419, l’Infant (le second fils du roi) Henri devient grand maître de l’ordre du Christ. Il est auréolé de la prise de Ceuta en Afrique du Nord. Il va mettre les ressources de l’ordre au service de son pays pour explorer de nouvelles terres. Les Portugais colonisent d’abord Madère, puis les Açores. Ils poussent jusqu’en Afrique noire où ils descendent de plus en plus au sud.

Le sucre de Madère, les esclaves d’Afrique enrichissent considérablement le Portugal et l’ordre du Christ qui se lancent dans de grandes explorations maritimes. Puis les Portugais poursuivent au Brésil, aux Indes et jusqu’en Chine.

Ce qui s’en ressent à Tomar qui va considérablement s’agrandir. Au début du XVIe siècle, le roi Manuel Ier, qui a donné son nom au style « manuélin » perce des ouvertures dans les murs austères de la Rotonde et refait la nef adjacente. Le couvent devient un énorme complexe avec pas moins de 16 cloitres ! 16 comme le nombre de côté de la Rotonde et de la mosquée d’Omar…

Quelques décennies plus tard, ces successeurs décident de démilitariser l’ordre du Christ. En 1581, c’est aussi à Tomar que le roi d’Espagne, Philippe II, obtient l’allégeance de la noblesse portugaise pour une union qui durera jusqu’en 1640.

Tomar, la ville des templiers portugais

Erwan Chartier
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