A un moment où le port du masque à bord des avions peut parfois inquiéter sur le confort d'un vol, souvenons-nous de ces petits agacements qui, il y a encore quelques mois, nous irritaient tant. Et qu'on se prendrait -presque- à regretter. Allez, on embarque façon nostalgie.

Bernard et Bernadette

Bernard et Bernadette sont charmants. Dès leurs places trouvées dans l'appareil, ils se sont lourdement appuyés sur leurs fauteuils à les faire plier pour nous saluer à l'arrière : « Vous allez aussi à Cuba ? » Devant nos visages surpris de la question à bord d'un avion direct de Paris avec terminus La Havane, ils ont semblé rassurés : « Nous aussi ! Et comme on est de grands voyageurs, on a amené ce qu'il faut pour le vol de nuit. » Nous allons  vite le comprendre dès le plateau-repas avalé. Le couple, assis au hublot et au centre, réveille délicatement le passager côté couloir qui venait de s'assoupir, pour aller récupérer dans sa valise un bloc de papier, un stylo et un jeu de cartes. Et alors que la cabine est plongée dans le noir et que l'ensemble des occupants a choisi d'éteindre les écrans pour s'en remettre aux bras de Morphée, nos nouveaux amis activent leurs liseuses, projecteurs directs du plafond qui éclairent autant les places arrière que celles des allumeurs, comme chacun sait. Nous donc ! Bernard et Bernadette brillent à coup sûr au firmament de la belote. Chaque point est contesté, scrupuleusement noté sur papier comme si leur honneur en dépendait, et les parties s'enchaînent avec un bruit de fond de discussions à en couvrir le ronronnement des réacteurs. Sans oublier les sauts de cabri sur le fauteuil à chaque victoire. Leur voisin se lève, va voir une hôtesse et se fait replacer ailleurs dans l'avion. Les joueurs exultent : ils peuvent allumer la 3ème liseuse et, chacun d'un bout de la rangée, se servir de la tablette du siège central comme espace de jeu. Aux murmures, nous devinons qu'à l'issue de trois heures de compétition, Bernadette a pris l'avantage mais Bernard assure qu'il n'a pas dit son dernier mot. Le match se poursuit donc. Nous n'avons pas encore pu fermer un œil quand l'aéroport de La Havane nous attend dans une heure.

Et soudain, ça bouge. Ils rangent les cartes et se retournent vers nous : « on est bientôt arrivés alors on va dormir un peu... et comme ils disent ici, buenas noches à vous aussi ! » De rien, merci. Trois minutes plus tard, la cabine s'illumine : le personnel va distribuer le petit déjeuner. « J'espère que leur café est bio » lance Bernadette à la cantonade... Sans se concerter, nous soupirons : pourvu surtout qu'il soit fort, on a une journée de visites à enchaîner après cette jolie nuit blanche constellée d'as et de dix de der.

 

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