Il y a toujours du monde place Syntagma au pied du Parlement d'Athènes à l'heure sonnante et à la demi. Ce n'est pas pour saluer la tombe du soldat inconnu érigée là mais pour suivre les évolutions millimétrées de ses gardes, les Evzones. A droite et à gauche du monument, chacun devant sa guérite, les deux hommes de faction, de jeunes appelés d'au moins 1m80, ne doivent pas bouger d'un cil. Enfin presque puisqu'ils ont le droit de faire un clignement d'œil pour dire « oui », deux pour « non » et trois pour « je ne sais pas ». En aucun cas, ils ne peuvent parler et si problème, il leur faut taper le sol de la crosse de leur fusil pour appeler un officier. Situation guère évidente quand l'été, un soleil à 40° vous tombe sur la tête, que la tempête souffle ou que, l'hiver, la nuit est fraîche. Car à midi, à minuit ou quatre du matin, et à leurs demis, le cérémonial se répète, imperturbable.

Les mouvements de la demi heure servent à dégourdir les guiboles menacées d'engourdissement. D'une marche lente saccadée, façon automate, jambe bien relevée et immobile en l'air dans le temps d'arrêt, les deux hommes vont se croiser, se saluer, tourner, avant de reprendre leur place. C'est déjà un spectacle. A l'heure, voici la relève. Avec un officier et un militaire en treillis chargé de leur sécurité, trois Evzones arrivent d'un des côtés du Parlement. Deux remplaceront les hommes en faction et le 3ème repartira avec les deux collègues épuisés par leur garde. Le tout en claquant bien fort au sol les souliers à clous. Le dimanche à 11h, le cérémonial prend le maximal de son ampleur avec au moins 12 Evzones à manœuvrer escortés d'une fanfare militaire.

 

Trois kilos de chaussures

 

L'uniforme, avec le haut en blanc, ocre ou noir selon le jour et la saison, a fait la gloire de cette unité d'élite, aujourd'hui dédiée à la parade. De haut en bas, il y a le béret de feutre rouge à gland de soie noire (le pharion), la chemise blanche à manches largement évasées (l'hypodète), le gilet brodé à la main de motifs traditionnels (le phermeli), la jupe appelée fustanelle faite d'un tissu de 30 mètres de long rangé en exactement 400 plis symbolisant les 400 ans d'occupation ottomane, un ceinturon cartouchière, les collants blancs en laine pour les soldats et le pantalon rouge à guêtres pour les officiers, les fixe-chaussettes, et enfin le préféré des spectateurs, les tsarouchias.

Ces chaussures noires et rouges cousues de multiples pièces de cuir pèsent chacune 1,5 kilo avec leurs 60 clous sous la semelle pour claquer le sol... et bien sûr avec sur la pointe, un gros pompon noir où selon la tradition, les Evzones cachaient une fine lame pour continuer à se battre au corps-à-corps ou botter cruellement les fesses de leurs adversaires en fuite, d'où l'habitude de lever bien haut la jambe dans la marche. Des candidats ?

Yves Pouchard

 On ne bouge pas !

 Le signal du dégourdissement.

 Jambe bien levée, on se rejoint, se croise, se contourne et on repart à sa guérite.

 Les tsarouchias et la fustanelle, l'identité de l'evzone.

 Enfin la relève arrive.

 Acte manqué ?

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