Reconnaissables à leurs couleurs vives et à leurs yeux d’Horus peints sur la proue, les luzzu sont les embarcations typiques de Malte. Leur histoire est liée à celle de cet archipel indépendant de l’extrême sud de l’Europe. Mais les fabricants se font rares et les matériaux composites ont remplacé le bois traditionnel.

Avec la fameuse croix des chevaliers, les luzzu sont l’un des symboles de Malte, cette petite république entre Europe et Afrique. La position stratégique de cet archipel le prédestinait à une histoire tumultueuse et son identité s’est nourrie d’apports multiples, comme en témoigne la langue maltaise, d’origine sémitique (arabe et peut-être de phénicien) mâtinée de mots italiens et anglais.

Les luzzu sont des petites embarcations traditionnelles, long de sept mètres, à bout pointu et manoeuvrable à la rame ou à la voile. Leur architecture les rapproche des navires de même taille que l’on retrouve en Sicile ou en Italie du sud. Mais elle a aussi pu être influencée par les navires du Maghreb tout proche, notamment à l’époque où les Hospitaliers contrôlaient l’île, entre le XVIe et la fin du XVIIIe siècle. Après avoir combattu en Palestine durant les croisades, ces moines-soldats se sont mués en véritables « corsaires de Dieu » en s’installant à Malte. Pendant deux siècles et demi, ils ont razzié les navires et les côtes des pays musulmans.

Œil phénicien

Le capian de ces navires traditionnels, le prolongement de l’étrave, très pointu, est typique de l’ouest de la Méditerranée. Selon certains, il serait un symbole de la force masculine. Très colorés, les luzzu sont peints de couleurs primaires et vives. La « moustache » à l’avant, est généralement en jaune.

Les navires maltais sont parmi les derniers en Méditerranée à avoir conservé la tradition de peindre des oculus sur la proue. Parfois baptisé œil d’Horus ou œil d’Osiris, ce symbole aurait été amené par les Phéniciens ou les Carthaginois. Il sert à effrayer les ennemis, à s’assurer la protection des puissances divines et à obtenir une bonne pêche. En effet, Malte ne possède pas de rivière, les poissons proviennent donc de la pêche en mer. La daurade est l’une des spécialités de l’île. Les habitants la piègent en mettant des branchages sur la mer, le poisson est en effet attiré par l’ombre.

Le Great Harbour, le grand port de la Valette était autrefois sillonné par une variante du luzzu, le dghajsa. Ils servaient à passer d’une rive à l’autre à l’époque des chevaliers puis des Britanniques. On en comptait encore un millier dans les années 1970. Aujourd’hui, beaucoup ont été reconvertis pour le tourisme, une manière agréable de découvrir les impressionnantes fortifications de La Valette ou, à l’autre bout de l’île, d’admirer la célèbre grotte bleue. Au sud de Malte, le joli port de Marsaxlokk abrite toujours de nombreux luzzu destinés à la pêche. Leurs couleurs vives donnent un cachet incomparable au lieu. Mais s’ils font la joie des visiteurs, les luzzu sont menacés. Les derniers fabricants arrêtent leur activité et les matériaux composites ont désormais remplacé le bois traditionnel. Quant à la voile, elle a été depuis longtemps abandonnée au profit de moteurs plus puissants.

L'oeil phénicien est emblématique des luzzu maltais

La moustache du navire est générallement peinte en jaune, la proue étant également décorée de motifs sculptés.

Partir à Malte avec Salaün Holidays

Erwan Chartier
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