Cri-cri, c'est le gentil nom que les Grecs donnent aux chèvres retournées à l'état sauvage. Mais aussi aux biquettes avec collier que leurs propriétaires laissent divaguer dans la nature la moitié de l'année pour qu'elles se débrouillent côté nourriture. Et pour être débrouillardes, elles le sont toutes à jouer de leur charme et d'un culot sans bornes. En Crète, où elles font partie du paysage, pas besoin de les chercher pour les trouver. Et elles semblent renifler le vacancier étranger à 20 km à la ronde, même caché dans une voiture de location à immatriculation locale. Donc nous voilà embringués en Skoda (déguisement supplémentaire !), à petite vitesse, dans le sentier pierreux et pentu qui rapproche du lagon turquoise de Balos à la pointe ouest de l'île quand l'assaut eût lieu. Alerte ! Cri-cri devant, cri-cri derrière, cri-cris latérales, bouc en planque en surplomb... Bêê-bêê qu'elles crient en grec. Comme nous sommes à l'aise dans la langue d'Homère, nous traduisons aussitôt en miam-miam. Sous le franc soleil crétois, les vitres sont forcément baissées et les museaux hypocrites s'y pointent tels de futurs obèses à un comptoir MacDo. Bêê-bêê. Zut, elles ont repéré le paquet de Curly à moitié vide alangui sur la banquette arrière. D'un geste précis, mais pas sans élégance, on s'en saisit. Et hop, un pour la rousse, un pour blanchette, puis c'est la noireaude, l'autre rousse, la bicolore... on surveille le bouc du coin de l'œil. No problem comme disent les touristes anglais en villégiature hellène. Bien sûr, il nous faut démontrer que le paquet est bien vide et la voie s'ouvre par miracle. Nous comprenons alors l'oracle d'un vieux pêcheur croisé sur le port de Kissamos (mucho): « quand les belles cri-cris bêlent, faut avoir un gri-gri beau ! »

 

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